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Une vie ailleurs
09/06/2006 09:39
Une vie ailleurs
Elle est trop bête la vie ! Mourir à 15 ans balancée de son vélo par une stupide voiture, c’est trop injuste, non ? C’est en tout cas ce que se dit Liz Hall lorsqu’elle se réveille à bord d’un étrange bateau qui la débarque sur Ailleurs. Ce territoire à l’image de la Terre est son nouveau chez elle, où elle va devoir supporter et vivre sa nouvelle existence, sa mort ! Quel est le sens de tout cela ?
S’il est bien un sujet difficile à aborder sans tomber dans le mélo minable, c’est bien la mort. Pas évident de parler d’un “ après ” que chacun envisage à sa façon, ou n’envisage pas du tout. Vision religieuse, athée ou nihiliste, ou pire, sataniste, l’image de la mort, l’ultime voyage, le grand rien ou le grand tout, est un tableau aussi compliqué à déchiffrer que les œuvres picturales contemporaines. Bref, comment s’en sortir ? Gabrielle Zevin le fait avec grand talent. Son roman est tout simplement étonnant de justesse, d’humour, de fraîcheur. Ses multiples personnages apportent une idée de la mort bien à eux. L’adolescente ne voit que le côté injuste de la mort. Comment est-il possible de mourir si jeune ? Elle n’a même pas eu le temps de vivre ! L’égoïsme de Liz est bien naturel et on se prend à penser que les adolescents ne sont pas forcément seuls à penser cela. Les autres personnages, hommes, femmes, vieux, jeunes, mariés, seuls, célèbres ou non, apportent leurs visions, les éléments qui vont construire une idée de l’“ après-vie ”. Sur Ailleurs, chacun doit trouver sa place, chacun doit apprendre à exister, à supporter son destin. Et le plus rafraîchissant est la vision très optimiste de l’auteur sur cette “ mort ”. En effet, chacun vit sa mort à rebours. Il rajeunit jusqu’à devenir un bébé qui va repartir sur Terre pour se réincarner. La vie et la mort ne sont que les deux parties d’un même cercle et ce cycle est sans fin. Si ça c’est pas de l’optimisme pur jus ! Voilà un livre en hommage à la vie, un livre qui vous redonnera le sourire, qui chassera vos derniers doutes sur cet “ après ”, qui anéantira vos peurs, en tout cas qui essaiera. Un joli livre tout en douceur et émotion à mettre entre toutes les mains.
Extraits : - Comment es-tu mort, Curtis ? - D'une overdose, apparamment. - Apparemment ? - C'est ce qu'ils ont dit aux infos : "Curtis Jest, leader du groupe Machine, a apparemment succombé à une overdose très tôt dimanche matin dans sarésidence de Los angeles. Il avait trente ans." C'st une grande tragédie tu vois. (Curtis s'esclaffe.) Et toi Lizzie ? Est-ce que tu sais maintenant ? - Accident de vélo. - Ah ,voilà qui explique le thème de la sécurité routière ... - Sans doute ... Ma mère s'escrimait en permanence à me faire mettre un casque. - Les mamans ont toujours raison ! Liz sourit. Peu après, elle est étonnée de sontir les larmes couler de ses yeux. Elle s'empresse de les essuyer avec sa main, mais elles sont aussitôt remplacée par d'autres. - Tiens, dit Curtis en lui tendant sa maanche de pyjama pour qu'elle se sèche les yeux. Liz accepte ce mouchoir improvisé. Elle remarque que le brasbîmé de Curtis est en train de guérir. - Merci. Ton bras va mieux, on dirait. Curtis baisse sa manche de pijama. - Ma plus juene soeur a ton âge. Elle te ressemble un peu d'ailleurs. - Nous sommes morts, tu sais ? Nous sommes tous morts. Et nous ne les verront jamais, dit Liz en pleurant. - Qui sait, Lizzie ? Peut-être que si. - Facile à dire pour toi ! Toi, tu as choisi de mourir. A peine ses mots sont-ils sortis de sa bouche que Liz les regrette. Crtis attend un instant avant de répondre. - J'étais un drogué. Je ne voulais pas mourir. - Je suis désolée. Curtis hoche la tête sans vraiment regarder Liz. - Je suis réellement désolée, insiste-elle? C'était idiot de ma part. Si j'ai dis ça, c'est parce que beaucoup de tes chansons sont un peu, disons ... noires. Il n'en reste pas moins que je ne devrais pas présumer certaines choses. - Excuses acceptées. C'est bien de savoir s'excuser correctement. Très rares sont les gens qui savent le faire. (Curtis sourit, et Liz lui rend son sourire.) N'empêche, certains jours, c'est vrai, j'avais envie de mourir, du moins un peu. Mais pas tous les jours.
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